Réponse de l'ange : les desseins de Dieu sont insondables
1L'ange qui m'avait été envoyé et dont le nom était Uriel me répondit 2et me dit : « Ton cœur est tout à fait égaré à propos de ce monde-ci et tu penses appréhender la voie du Très-Haut ? » 3Je dis : « Oui, mon Seigneur. » Il me répondit : « J'ai été envoyé pour te montrer trois voies, pour proposer trois paraboles devant toi. 4Si tu m'en expliques une seule, moi, je te montrerai la voie que tu désires voir et je t'enseignerai pourquoi le cœur est mauvais. » 5Je dis : « Parle, mon Seigneur. » Il me dit : « Va, pèse-moi le poids du feu, ou mesure-moi le souffle du vent, ou fais-moi revenir le jour écoulé. » 6Je répondis : « Lequel des enfants des hommes pourrait le faire, pour que tu m'interroges là-dessus ? » 7Il me dit : « Si je t'interrogeais en disant : Combien y a-t-il d'habitations au cœur de la mer, combien de sources à l'origine de l'abîme, combien de voies au-dessus du firmament ou quelles sont les issues du paradis, 8tu me dirais peut-être : Je ne suis descendu ni dans l'abîme, ni encore en enfer ; et jamais je ne suis monté dans les cieux. 9Pour l'instant, je ne t'ai interrogé que sur le feu, le vent et le jour par lequel tu es passé – choses dont tu ne peux être séparé – et tu ne m'as pas répondu là-dessus ! » 10Il me dit aussi : « Si toi tu ne peux connaître ce qui grandit avec toi, 11comment pourrais-tu saisir la voie du Très-Haut ? Et, alors que tu es déjà terrorisé par le monde corrompu, comment pourrais-tu comprendre l'incorruptibilité ? »
Quand j'entendis cela, je tombai sur ma face 12et je lui dis : « Il aurait mieux valu pour nous ne pas exister que venir vivre parmi les impiétés et souffrir sans comprendre pourquoi. » 13Il me répondit : « Je suis parti, m'en allant vers la forêt d'arbres de la plaine ; ils formèrent un projet 14et dirent : “Venez, allons faire la guerre à la mer, qu'elle recule devant nous et que nous y fassions pour nous d'autres forêts.” 15De même, les flots de la mer formèrent, eux aussi, un projet et dirent : “Venez, montons guerroyer contre la forêt de la plaine pour nous adjoindre là un autre pays.” 16Mais le projet de la forêt échoua, car le feu vint la consumer ; 17de même aussi le projet des flots de la mer, car le sable se dressa et les en empêcha. 18Si donc tu étais leur juge, lequel entreprendrais-tu de justifier et lequel de condamner ? » 19Je répondis : « L'un et l'autre ont formé un projet vain, car la terre a été donnée à la forêt, et à la mer, un lieu pour porter ses flots. » 20Il me répondit : « Tu as bien jugé ; pourquoi n'as-tu pas jugé ton propre cas ? 21En effet, de même que la terre a été donnée à la forêt et la mer à ses flots, ainsi ceux qui habitent la terre peuvent comprendre seulement ce qui est sur terre, et ceux qui se trouvent au-dessus des cieux ce qui dépasse la hauteur des cieux. »
Attendre la moisson finale
22Je répondis : « Je te prie, Seigneur, pourquoi la faculté d'intelligence m'a-t-elle été donnée ? 23Je n'ai pas voulu t'interroger sur les voies d'en haut, mais sur celles qui passent par chez nous chaque jour : pourquoi Israël a-t-il été livré en opprobre aux nations ? Pourquoi lui, le peuple que tu as aimé, a-t-il été donné à des tribus impies ? Pourquoi la loi de nos pères a-t-elle été annulée et pourquoi les dispositions écrites n'existent-elles nulle part ? 24Nous avons traversé l'existence comme des sauterelles, notre vie est comme une vapeur, et nous ne sommes pas dignes d'obtenir miséricorde. 25Mais que fera-t-il pour son nom qui est invoqué sur nous ? C'est là-dessus que je t'ai interrogé. »
26Il me répondit : « Si tu es là, tu verras, et si tu vis, tu t'étonneras souvent, car le monde se hâte rapidement de passer ; 27il sera incapable de porter les promesses qui, en leurs temps, ont été faites aux justes, puisque ce monde-ci est plein de tristesse et d'infirmités. 28En effet, le mal sur lequel tu m'interroges a déjà été semé mais son arrachage n'est pas encore venu. 29Si donc ce qui a été semé n'est pas moissonné, et si ne disparaît pas le lieu où le mal a été semé, le champ où le bien a été semé ne viendra pas. 30Car un grain de la semence du mal a été semé dans le cœur d'Adam dès le commencement, et combien d'impiété n'a-t-il pas produit jusqu'à maintenant, combien n'en produira-t-il pas jusqu'à ce que vienne la moisson ! 31Fais donc en toi-même l'estimation : combien le grain de la semence du mal a-t-il produit de fruits d'impiété ! 32Lorsqu'auront été semés des épis innombrables, quelle grande moisson produiront-ils ! »
33Je répondis : « Où et quand cela ? Pourquoi nos années sont-elles limitées et mauvaises ? » 34Il me répondit : « Ne te hâte pas plus que le Très-Haut, car toi, tu as à te hâter pour toi-même, mais le Très-Haut le fait pour beaucoup. 35N'est-ce pas à ces sujets que les âmes des justes dans leurs réservoirs ont interrogé en disant : Jusques à quand ai-je à espérer ainsi ? Quand récolterons-nous le fruit de notre récompense ? 36L'archange Hieremiel leur répondit : Lorsque sera complet le nombre de vos semblables. En effet, Dieu a pesé le monde dans sa balance, 37il a mesuré la mesure des temps, il a dénombré le nombre des temps ; il ne provoquera ni ébranlement ni agitation, avant que ne soit complète la mesure prédite. »
38Je répondis : « O Seigneur et Maître, mais nous aussi, nous sommes tous pleins d'impiété. 39Ne serait-ce pas à cause de nous qu'est entravée la moisson des justes, à cause des péchés des habitants de la terre ? » 40Il me répondit : « Va interroger la femme enceinte pour savoir si son sein peut encore retenir en lui le fœtus, quand ses neuf mois sont achevés. » 41Et je dis : « Elle ne le peut, Seigneur. » Il me dit : « Dans l'enfer, les réservoirs des âmes sont comparables au sein maternel. 42Car de même que celle qui enfante a hâte d'en finir avec la contrainte de l'enfantement, de même ces réservoirs ont hâte de restituer ce qui leur a été confié 43dès le commencement. Alors il te sera fait des révélations sur ce que tu désires voir. »
44Je répondis : « Si j'ai trouvé grâce à tes yeux, si c'est possible et si j'en suis capable, 45montre-moi aussi ceci : y a-t-il plus de temps à venir que de temps passé ou s'est-il écoulé plus de temps avant nous ? 46Car je sais ce qui s'est écoulé, mais j'ignore ce qui est à venir. » 47Il me dit : « Tiens-toi à ma droite et je vais te montrer l'interprétation d'une parabole. »
48Je me tins là et je vis : voici qu'une fournaise ardente passa devant moi ; or une fois la flamme passée, je vis et voici qu'il subsistait de la fumée. 49Ensuite un nuage plein d'eau passa devant moi et il déversa une grande pluie avec violence et, une fois passée la violence de la pluie, il resta des gouttes. 50Il me dit : « Réfléchis pour ton compte : de même que la pluie surpasse les gouttes et que le feu surpasse la fumée, de même la mesure du passé l'a largement emporté ; il subsiste néanmoins des gouttes et de la fumée. »
Les signes de la fin des temps
51Je priai et je dis : « Penses-tu que je vivrai jusqu'à ces jours-là ? Qui sera là en ces jours ? » 52Il me répondit : « Concernant les signes sur lesquels tu m'interroges, je peux t'en dire une partie, mais concernant ta vie, je n'ai pas été envoyé pour te le dire et je ne le sais pas.