Eloge des sept martyrs
1Si les sept frères ont méprisé les douleurs jusqu'à la mort, on reconnaît donc universellement que la raison pieuse est souveraine des passions. 2Si, en effet, asservis aux passions, ils avaient mangé des aliments impurs, nous dirions qu'ils auraient été vaincus par elles. 3Or précisément il n'en fut pas ainsi : au contraire, grâce à la raison louable auprès de Dieu, ils l'emportèrent sur les passions. 4Et il n'est pas possible de méconnaître le pouvoir de leur réflexion, car ils ont dominé les passions et les douleurs. 5Comment donc est-ce possible de ne pas reconnaître le pouvoir de la raison sur les passions chez eux qui n'ont pas reculé devant les souffrances causées par le feu ? 6En effet, de même que les tours avancées des ports brisent la fureur de vagues et procurent aux navigateurs un refuge tranquille, 7ainsi la raison de ces jeunes gens, semblable à sept tours, a fortifié le port de la piété et vaincu la démesure des passions.
8Formant un saint chœur de la piété, ils s'encourageaient les uns les autres en disant : 9« Frères, mourons fraternellement pour la Loi ! Imitons les trois jeunes gens d'Assyrie qui ont méprisé une semblable fournaise. 10Ne soyons pas des lâches pour donner la preuve de notre piété ! » 11L'un disait : « Sois courageux, frère » et l'autre : « Supporte noblement ». 12Et un autre se remémorant disait : « Souvenez-vous d'où vous venez, ou de la main de quel père Isaac supporta d'être immolé pour la piété. » 13Tous ensemble et chacun se regardant, radieux et pleins de courage, disaient : « Consacrons-nous à Dieu de tout notre cœur, à lui qui nous a donné la vie, et servons-nous de notre corps pour la défense de la Loi. 14Ne craignons pas celui qui paraît donner la mort. 15Car grands sont le combat de l'âme et le danger pour ceux qui transgressent le commandement de Dieu d'être dans un tourment éternel. 16Armons-nous donc de la maîtrise des passions que nous donne la raison divine. 17Morts, nous serons accueillis par Abraham, Isaac et Jacob et tous les pères nous loueront. » 18Et, à chacun des frères qui était emmené, ceux qui restaient disaient : « Ne nous déshonore pas, frère, et ne fais pas mentir nos frères morts avant nous. »
19Vous n'ignorez pas la force de l'amour fraternel que la divine et toute-sage providence a partagé par le moyen des pères entre ceux qu'ils engendrent, et qu'elle a planté dans le sein maternel. 20Là, les frères habitent durant un temps égal, façonnés dans ce même temps, croissant du même sang et conduits à maturité par le même principe de vie. 21Puis, ils sont enfantés après le même temps, allaités aux mêmes sources ; de ces liens se nourrissent les âmes fraternelles. 22Ils grandissent chaque jour nourris à la même table, soumis aux mêmes habitudes quotidiennes, recevant la même éducation et s'exerçant dans la Loi de Dieu. 23Ainsi donc si l'amour fraternel est fort, les sept frères avaient les uns pour les autres un amour plus fort. 24Car, instruits dans la même Loi, s'exerçant aux mêmes vertus, élevés ensemble dans une vie juste, ils s'aimaient encore davantage. 25Le zèle égal pour la vertu parfaite fortifiait leur affection mutuelle et leur concorde, 26car avec la piété, leur amour fraternel était rendu plus ardent. 27Mais cependant, bien que la force de leur amour fraternel ait été augmentée par la nature, la vie commune et la pratique de la vertu, ceux qui restaient supportaient, à cause de la piété, de voir leurs frères maltraités, torturés jusqu'à la mort.